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TRIBUNE : Dissolution de la base aérienne militaire de Châteaudun : "notre territoire mérite un peu de considération de l’État"

La sous-préfecture d’Eure-et-Loir connaît sa troisième fermeture de site militaire. Mais l’aide financière de l’État n’est pas au rendez-vous, estime le maire de la commune, Fabien Verdier. Celui-ci regrette au passage que la cérémonie de dissolution du site s'effectue - à ce jour - sans ministre, ni Chef d'État-Major des Armées…

C’est dans un contexte de sortie de crise sanitaire que les territoires (les plus) fragilisés par la pandémie de Covid-19 ont plus que jamais besoin d’un soutien total de la part de l’État pour relancer et développer leur attractivité. Dans le sud de l’Eure-et-Loir, nous lançons, au travers du Grand Châteaudun que je préside, un appel solennel d’urgence au ministère des Armées et à l'État concernant le projet civil de restructuration de l’ex-base aérienne 279 de Châteaudun. Une aide financière et politique dont l’intercommunalité ne pourrait se passer et dont les enjeux économiques, industriels, touristiques et sociaux dépassent - très largement - les limites du département eurélien.

L'immense potentiel du site n'est plus à démontrer : l'aérodrome figure parmi l'une des vingt meilleures plateformes aéronautiques de France ; il comporte une piste de plus de 2 300 m de long (45 m de large), 120 chambres sur site, des centaines de bureaux, une hélistation, un mess des officiers avec une capacité de 1 200 couverts (matin, midi, soir), un bâtiment aéronautique dit « Poulmic » de 15 000 m2 à hygrométrie contrôlée (plus grand site aéronautique militaire de France, voire d'Europe), 8 hangarettes de 700 m2 chacune, d'une magnifique collection avec 45 avions, plus de 110 000 m2 de surfaces au sol, etc. Une plateforme aéronautique quasi prête à l'emploi à 130 km de Paris de 450 ha au total. Avec des militaires de grande qualité et professionnels, qui ont eu à cœur, année après année, d'entretenir et de conserver le site dans le meilleur état possible, au regard des budgets alloués. Nous leur en sommes pleinement reconnaissants.

Ces militaires, les cadres du ministère des Armées, la préfecture, les représentants locaux de l'État nous aident et nous accompagnent au mieux de leurs possibilités, réunion après réunion, tour de table après tour de table ; le soutien logistique, humain, technique est maximal, l'appui est sincère et précieux.

DE TROP FAIBLES MOYENS FINANCIERS

Mais aujourd’hui, de trop faibles moyens financiers sont mis en œuvre pour le site de la base aérienne 279 (avec un Contrat de redynamisation du site de défense n° 2, signé fin décembre 2019, significativement pas assez fourni, comme nous le rappelons depuis de très nombreux mois, avec en outre un reste à financer d'environ 25 %). Ce manque de moyens financiers et humains dévolus à Châteaudun pourrait avoir, même à court terme, des conséquences directes sur l’entretien de l’aérodrome et sur l’état de sa piste principale.

Nous le pensons et le répétons : l’État central doit s’engager et soutenir ce projet afin de pallier un lourd préjudice déjà engagé : le départ de 1 200 militaires au total, ainsi que leurs familles. Ce site est à vocation militaire depuis 1935. Soit depuis quatre-vingt-six ans. Dans ce contexte, une transition ne peut qu'être fortement accompagnée. Il s'agit du projet du siècle pour notre territoire. À Dijon, une contrepartie significative de l'État avait par exemple été octroyée avec l'arrivée de l'école de Gendarmerie (formation initiale des sous-officiers de gendarmerie). Rien n'est prévu à cette date pour Châteaudun.

UN PROJET VIABLE

La restructuration de cette ancienne base aérienne est une priorité pour nous. L'amorce de notre nouveau projet, son démarrage et la transition d’une activité militaire vers une activité civile ne pourra se faire sans l’aide de l’État. Nous estimons que ce projet de transition vers un petit aéroport civil vert ne peut s’effectuer, à ce jour, dans des conditions optimales, en particulier financières. Il serait viable et positif en étant abondé par l’État de 4 millions d’euros par an au cours des trois prochaines années. Il s'agit - pour l'État - d'un investissement, d'un investissement pour l'avenir, sur un actif majeur, stratégique pour notre pays.

Ce projet bénéficie en outre déjà d’une solide étude de marché (réalisée par des experts aéronautiques) et d’un plan d’affaires de qualité sur quinze ans (travaillé par des auditeurs et des spécialistes aéroportuaires). La rentabilité de court et long terme est démontrée ; la zone de chalandise s'élève à 3,5 millions de personnes dans un rayon à 1 h 30 de Châteaudun, qui est depuis toujours idéalement positionné ; le potentiel de trafic en aviation générale, d'affaires, puis commerciale est attesté ; les recettes liées aux activités bords de piste, les 60 000 m2 de hangars du site, les activités de parking/hangars d'avions sont de grande importance. Les investisseurs sont attendus ; plusieurs frappent déjà à nos portes.

À très court terme, cette aide (ponctuelle) de l’État permettrait également de développer rapidement une activité aéronautique civile et de pouvoir garantir un accompagnement pour cette transition (sécurisation des espaces, entretien des bâtiments, gestion des infrastructures…). De plus, cette restructuration du site comporte également un sujet propre aux énergies renouvelables avec la présence d’une centrale photovoltaïque d'environ 84 ha, ainsi que d'espaces importants dédiés à la protection de la biodiversité et de l’environnement, ce qui en fait un projet écologique d'envergure et exemplaire, avec demain des avions hydrogènes, électriques et hybrides.

REGRETTABLES ABSENCES

Si l’aspect économique et industriel revêt un point central sur ce sujet avec l'objectif de création de plus de 1 000 emplois à moyen/long terme, le Grand Châteaudun réclame aussi un soutien politique de la part du ministère des Armées et de l’État central. En effet, depuis l’annonce à l’été 2018 de la dissolution de l’ancienne base aérienne, nous déplorons qu’aucun ministre ne se soit rendu sur l'aérodrome de Châteaudun. Le 21 juillet 2021, la cérémonie de dissolution du site de défense de Châteaudun s'effectue - à ce jour - sans ministre, ni Chef d'État-Major des Armées. Nous avons invité à plusieurs reprises Florence Parly, ministre des Armées. Nous le déplorons.

Cette très faible implication nationale est très préjudiciable pour Châteaudun et son territoire. L'abandon ou le désintérêt par l'État français de notre ville, décorée pourtant de la Croix de la Légion d'honneur (depuis 1877), n'est pas acceptable. Cette légion d'honneur, la plus haute décoration honorifique française, récompense depuis ses origines les militaires comme les civils - et plusieurs villes - ayant rendu des “services éminents” à la Nation. Cela pourrait signifier en conséquence que l'État se désintéresse de ceux qui ont pu servir avec honneur pour leur patrie. Nous souhaitons l'énoncer et le rappeler dans cette tribune. Les villes moyennes - et par ricochet les classes moyennes - sont ici une nouvelle fois trop oubliées.

L'ADN DE CHÂTEAUDUN

Or, il s’agit pourtant de la troisième fermeture de site militaire pour notre territoire après l’ETAMAT (l’Établissement du matériel de l’armée de terre), la caserne Kellermann, et donc la base aérienne 279. Trois fermetures successives sur un territoire pourtant pourvu d’importants atouts. Le préjudice est considérable pour une ville comme la nôtre, qui n’est pas une préfecture de région, mais une sous-préfecture avec ses 13 500 habitants. La perte de 1 200 militaires, leurs pouvoirs d'achat, le déclin des trois sites militaires dans une ville dont l'ADN était attaché et associé à cette histoire des Armées et de la Défense nationale, liée à la République (de la IIIème à la Vème), trouve une résonance accrue en cette veille de 14 juillet.

Ce projet de transition de la base aérienne 279 en petit aéroport civil vert s’inscrit comme un tournant à réussir pour l’avenir de notre territoire et très au-delà. Celui-ci est créateur d’emplois pour le bassin du Grand Châteaudun, d’attractivité pour la région Centre-Val de Loire (Orléans est la seule capitale régionale à ne pas disposer d'aviation commerciale à proximité), de fort développement touristique, de désenclavement européen et international pour l’Eure-et-Loir, le Loiret, le Loir-et-Cher, l'Essonne… soit plus de 1,5 million d’habitants. Espérons que l'État nous entendra.

 

 

Par Fabien Verdier

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