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Interview de Jean Fauque

© Stéphane de Bourgies

Rencontre avec Jean Fauque, parolier d'Alain Bashung et ancien membre du Conseil d'administration de la SACEM.

Vous êtes principalement connu pour avoir été le parolier d’Alain Bashung. On vous doit notamment les célèbres chansons Osez Joséphine , Ma petite entreprise, La nuit je mens. Comment fait-on pour en écrire d’autres après de tels succès ?

On se remet au travail comme si de rien n'était, écrire une chanson est toujours une nouvelle aventure. On est à la fois conforté et en même temps l'on craint de ne pas retrouver le même succès, on doute toujours.

Vous avez écrit, entre autres, pour Johnny Halliday, Jacques Dutronc, Patricia Kaas, Luz Casal, Vanessa Paradis. Avoir écrit pour Alain Bashung et rencontré le succès avec l’album Osez Joséphine vous a-t-il ouvert la porte pour travailler avec d’autres artistes ?

Oui, c'est souvent le premier succès le plus difficile, les portes s'ouvrent ensuite naturellement. J'ai eu ainsi la chance de pouvoir collaborer avec des artistes qui avaient à mes yeux d'adolescent  une dimension mythique: Johnny, Jacques Dutronc, Christophe, Polnareff (même si avec les 2 derniers cela n'a pas abouti).

Que pensez-vous de la chanson française aujourd’hui ? Pensez-vous que Brel, Bashung, Gainsbourg et autres grands chanteurs aient des « héritiers » ?

Chaque époque engendre des talents, il y en a beaucoup aujourd'hui. Ensuite, c'est une histoire qui s'inscrit dans la durée, c'est le temps qui finit par faire les grands artistes.

Jusqu’à l’année dernière vous faisiez partie du conseil d’administration de la SACEM. Pouvez-vous nous rappeler les missions de cette institution ? 

Elle là pour collecter les droits d'utilisation de la musique et ensuite les répartit selon la diffusion aux créateurs et aux éditeurs. C'est le seul et unique salaire des auteurs et compositeurs. Un autre de ses rôles est aussi d'aider des projets musicaux, des lieux de diffusion, des spectacles, des tournées, des festivals (à hauteur d'environ 21 millions d'euros en 2014).

Pourquoi avoir accepté de siéger au Conseil d’Administration de la SACEM ?

Les membres du Conseil sont élus par les sociétaires, j'ai voulu me présenter pour mieux comprendre les arcanes de la gestion de la maison et essayer d'être utile à tous mes pairs en aidant à son bon fonctionnement. La SACEM est depuis ses débuts autogérée par ses sociétaires, c'est une sorte de grande coopérative.

Les archives de la SACEM regorgent de trésors. Selon vous, comment faut-il valoriser ce patrimoine?

Des prêts d'archives sont déjà en place pour diverses expositions. Un musée en ligne sera bientôt accessible à tous pour exposer des documents rares. Je fais partie d'une commission récente, la Commission Mémoires, qui est en charge de cette valorisation.

Le numérique a bouleversé la donne en terme de droits d’auteurs en laissant un accès presque libre à la musique. Comment voyez-vous l’évolution de la protection des droits d’auteurs dans ce cadre ? Que pensez-vous des plateformes telles que Deezer ?

Le piratage a engendré une catastrophe en privant les producteurs, surtout les petits et moyens, de ressources qui leur auraient permis de réinvestir dans le développement de nouveaux talents. Toute plateforme inscrite dans la légalité doit être vue d'un bon œil. L'abonnement payant devrait se développer plus rapidement, franchement, 25.000.000 d'œuvres musicales accessibles pour le prix au mois d'un ou deux verres dans un café, moi c'est le prix du verre que je trouve scandaleux! Et continuer à pirater encore plus…

Est-ce qu’il est plus facile aujourd’hui de « percer » en tant que chanteur et / ou compositeur grâce à internet ? Selon vous, est-ce que cela améliore ou amenuise la qualité de la musique aujourd’hui ?

C'est certes un moyen de diffusion qui peut être formidable. On s'aperçoit quand même que c'est encore les grands médias traditionnels, radio ou télé, qui font souvent le succès. Ca ne change rien à la qualité de la musique, bien que ça permette à des artistes ou œuvres sans grand talent d'être exposés, sans le filtre des circuits professionnels. A l'inverse, c'est plus rare, ce peut être un outil pour être révélé en court-circuitant justement le processus classique.

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